Vers l’abstraction

betCela fait un petit moment que je ne suis pas revenu sur le jeu. Je crois qu’il fait simplifier la règle pour le rendre plus accessible.

Je crois qu’il faut simplifier les ressources et en chevaliers avec un taux de conversion entre eux. Il faut plutôt que toutes les ressources soient prises directement en main par le seigneur PUIS il distribue au besoin (sur les paysans pour croitre, dans des guerriers, dans des bâtiments). Cela crée une diversité de choix plus directe avec des compromis clairement exprimés.

Pour la guerre, il ne faut pas que ça devienne un jeu de plateau. La lutte contre les menaces extérieures doivent être en investissant des guerriers. On les mets dans sa main de manière cachée et on révèle pour savoir si il y en a suffisamment. (à la condition de vouloir faire la guerre avec les autres). Chacun perd des gurriers en fonction de combien ont participer.

Exemple : On se dit que ça fait longtemps qu’il n’y a pas eu d’invasion (c’est mauvais signe). On discute sur les engagements des uns et des autres. Quatre décident d’y aller ensemble. Il révèlent leur main ils ont 26 au total, l’armée d’invasions en a 15. Ils gagnent donc il y a donc 26 – 15 = 11 soldats restants. Les 15 pertes sont distribués entre les 4 joueur. 15/4 = 3 (arrondi inferieur), chacun perd 3 guerriers.

D’ou l’intérêt d’une tour de guet dans l’information sur ce qui est caché (les invasions). L’intérêt du jeu est alors le décalage entre la phase de négociation et la phase d’investissement réel. Les guerriers investis ne devraient pas pouvoir servir pour une guerre privée.

Pour la prise d’un chateau, la règle peut être simple, il faut le double de guerriers. Une guerre entre seigneur est identique aux invasions, elle mobilise les bélligérants en négociation, puis on résout en investissant des guerriers.

Pour le joueur barbare, le pillage est son mode de rémunération. Il doit avoir le choix chaque tour de faire un raid dans une autre région pour accumuler des richesses avec lesquelles il va pouvoir recruter des armées pour attaquer. Plus il a d’armées avec lui, plus il doit être capable de faire des raids intéressants et rémunérateurs (mais risqués également).

Au niveau du plateau, ça devient simple. On représente toujours le paysage mais avec des pions. Soit ils sont collés et c’est le village perché, soit ils sont détachés les uns des autres et ils sont en plaine. Résultat on peut jouer à peu près n’importe où.

Vassal, ses décisions sont prises par son seigneur. Il peut décider de le trahir dans une guerre privée pour récupérer son autonomie. Il récupère alors la moitiée de ses troupes par exemple.

Ce qu’il y a de bien dans cette nouvelle manière de voir c’est qu’on va passer moins de temps à faire de la micro-gestion qui au final n’est pas le sel du jeu. Il faut qu’il y ait des investissement, des paroles non tenues, des rancunes, etc.

 

10 – Mc Nabb wood art of city

metros-4Un très beau travail de l’artiste américain McNabb qui utilise des chutes de bois pour bâtir des unités d’immeubles qui peuvent ensuite s’assembler pour former une mosaïque complexe urbaine du type moderne/américaine.

http://www.mcnabbstudio.com/news-metros.html

Il pourrait être très intéressant de récupérer cette méthode pour bâtir un village perché, la hauteur de la base permettant de construire de plus en plus haut, donnant ainsi un effet de « colline » par construction, inversant quelque part ce qu’on peut voir sur la photo jointe.

9 – Le jeu selon Crozier et Friedberg

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« Dire qu’il y a jeu n’implique nullement quelconque égalité de départ entre joueurs ni un quelconque consensus sur les règles mêmes du jeu. » (p115 – L’acteur et le système)

Je suis tout à fait d’accord avec ce point. Je crois d’ailleurs que c’est tout le sens de mes premières remarques sur les jeux, à savoir qu’il faut explorer des formes plus complexes de jeux, allant au delà de l’égalité de départ (pas très réaliste) et de la connaissance parfaite du cadre des règles. C’est dans ce sens par exemple que j’avais à cœur de laisser les conditions de victoire ouverte.

Ce qui est intéressant, c’est de constater que laisser les conditions de victoire ouvertes est souvent vu très négativement par ceux avec qui j’en parle, comme quelque chose de très injuste. On peut facilement le comprendre puisque c’est mettre beaucoup d’incertitude dans le système. Comment savoir si mes actions seront récompensées?

Ce qui est fascinant alors, c’est l’écart qui existe entre notre désir d’égalité des chances, peut-être une donnée primatologique, et la réalité sociale de cette égalité. Ce qui est intéressant également c’est que se sont les défavorisés de cette inégalité qui ont un sentiment de révolte, apparemment pas les bénéficiaires de celles-ci.

8 – De plus en plus précis sur l’histoire

Les villages perchés ne sont pas où ils sont par hasard. C’est en regardant « le temps des cathédrales » de Georges Duby que j’ai pu entendre ça, la féodalité la plus brutale s’exerce particulièrement là où un pouvoir central ne s’exerce pas. D’où une féodalité moins dure dans le Nord-Est de l’Europe autour de l’an Mil, encore sous domination Carolingienne, centralisatrice. Apparement la Provence est un lieu de luttes particulièrement brutales, ce qui va bien de paire avec le mouvement de perchement.

Brutal et pauvre également puisque la fiche wikipedia sur la dîme indique qu’en Provence on n’y prélevait que le cinquantième, par rapport à d’autres régions où on y prélevait le huitième. Cette pauvreté va dans le sens de l’historien Fernand Benoit « La misère groupe l’habitat, l’aisance le disperse ». La lecture de son dernier livre La Provence et le Comtat Venaissin sera je l’espère très intéressant.

Tout semble se passer de la façon suivante. Le Sud-Est de la France (et probablement bien des zones italiennes également) ont été riches sous l’empire Romain qui avaient sécurisés ces espaces très proches du coeur de l’Empire. Une fois cet ordre éteint, c’est dans un chaos particulièrement élevé qu’elles se sont retrouvées puisque les qualités d’hier se sont retrouvés être des défauts. Les plaines attirent toutes les convoitises, la façade maritime aident les conquêtes et les rapines. La relative pauvreté de ces espaces génèrent des troubles et la richesse de ces espaces ne permet pas d’attirer en priorité la protection des rois européens ni ne permet véritablement l’ascension et le regroupement d’un royaume. Plus ou moins livrées à elles mêmes ces zones voient plus facilement l’élévation de ces villages d’altitude.

7 – La paix de Dieu

Cleric-Knight-WorkmanJe me posais la question de la place à donner à l’église dans le jeu et c’est en lisant la fiche wikipedia sur la paix de Dieu que j’ai mieux compris le rapport de force qui existe entre les seigneurs locaux et l’église.

La période se précise petit à petit, on peut situer l’action au Xième siècle dans le Sud-Est de la France dans une région de plaine où les villages ont petit à petit été amené à se percher car particulièrement exposé aux instabilités de l’époque. L’article phare à ce sujet reste celui là, écrit en 1929 par Maurice Rey.

Je suis tombé sous le charme des jeux de Richard Sivèl (Wir sind das Volk & Maria) où notamment il y a un vrai talent pour l’asymétrie des joueurs. J’ai testé la guerre froide de l’Allemagne coupée en deux et je suis impatient de pouvoir tenter son système à trois joueurs dont un schizophrénique (le joueur qui incarne Friedrich).

Je crois qu’en lisant la fiche sur la paix de Dieu on voit bien qu’il faut faire intervenir une troisième force qui soit religieuse et qui vient à la fois contredire la toute puissance des seigneurs (leurs pillages, razzias et autres guerres privées, surtout contre les biens de l’église) mais aussi être une promesse de prospérité par la paix sociale. La mise au pas des seigneurs est vraiment un objectif particulièrement intéressant. On pourrait imaginer par exemple que l’objectif de l’église est de mettre au pas les seigneurs présents autour de la table. Ceux-ci n’en ont pas l’intérêt car cela les limite en terme de guerre et de prélèvement sur les paysans. Si toutefois l’église arrive à faire souscrire les seigneurs à cette cause, on peut imaginer alors une victoire de l’Eglise associée avec le seigneur capable de mobiliser le plus de chevaliers pour l’appel à une croisade.

En ce sens, l’église est elle aussi un peu schizophrène car elle a besoin des seigneurs qui sont seuls capable de faire la guerre ou de maintenir la paix et en même temps elle doit construire sa légitimité sur la protection des paysans (dont les seigneurs tirent leurs moyens de guerre).

6 – Test du jeu Village perché

Petit test du premier prototype du village perché. Version très simple, trois villages, très peu de cases et un seul type de ressource.

Notes :

  • Besoin d’une zone à part pour représenter les différentes éléments du village perché (rajouter une tuile maison, église, forge, etc sur laquelle on peut accumuler des ressources et autres)
  • Diversification : une carrière et une mine sont disponibles au départ. Il est nécessaire d’envoyer des habitants pour y exploiter les ressources. Le ratio est 2 nourriture pour une pierre ou un métal. Pour un nourriture on peut obtenir un bois. L’habitant mobilisé n’ajoute pas de ressources.
  • Partie avec  : Maison de village +1; Plaine +2; Plaine et rivière +3
  • Les guerriers, religieux et autres artisans doivent être obtenus lors d’une croissance et transformé comme tel. Il coute une ressource en nourriture chaque tour.
  • La proximité de l’église donne l’initiative au combat, sinon ils restent simultanés.
  • idée : il faut prélever des taxes similaires dans les zones similaires sous peine de créer des mécontentements paysan.
  • La forge peut produire des armes comme de l’outillage agricole (charrue)

Le plateau avec des hexagones est très symétrique et c’est assez efficace en terme de jouabilité. Je crois toutefois que j’aimerais y mettre un aspect « puzzle » qui colle plus avec l’aspect agricole. Pourquoi pas un fond de foret sur lequel on viendrait y mettre une tuile « ferme » qui viendrait comme défricher l’endroit.

5 – MIT GameLab & MALT

ChezTaMèreJeuxUn lien vers les cours du GameLab du MIT à garder sous le pouce pour revenir sur des points de game development.

Pour l’essentiel, je dirais que le message est qu’il faut se concentrer sur l’expérience. Ce que ça veut dire, c’est qu’en tant que designer, je dois chercher à savoir quelle saveur je veux donner à l’experience mais aussi quelles expériences j’aimerai générer par le jeu.

L’autre point avec l’expérience, relié à ce premier point, est qu’il faut tester le jeu. Pour progresser il faut justement générer des expériences. Ce sont les itérations qui vont affiner l’expérience.

Il faut que j’essaye de participer aux séances d’exploration de prototype qui est fait par l‘association MALT de créateurs de jeux.

4 – le passage à l’acte

Les bases de mon jeu sur les villages perchés est assez claires maintenant et je dois passer à la réalisation d’un premier prototype. Je sais qu’il faut que je me lance car il n’y a pas de réalisation de jeu sans itération expérientielles. Pourtant, je n’arrive pas à me lancer. J’ai acheté du matériel pour m’assurer d’avoir tout ce qu’il faut pour le réaliser, mais je sais pertinemment que ce n’est pas le problème.

Il est tellement évident que ce premier jeu sera un échec que j’ai un peu peur de me lancer je crois.

3 – Explorer les interdits

Un première étape est certainement d’explorer les interdits. A ce sujet, les possibilités sont innombrables. Je pense notamment à la possibilité de mettre en scène des systèmes politiques pour en explorer les contours. C’est un peu l’idée sous jacente derrière l’idée d’un Monopoly libéral par exemple. C’est également ce qu’on peut explorer en générant des jeux très injustes dans les conditions de départ.

Mais je pense aussi à explorer des mondes avec lesquelles on peut se sentir mal à l’aise. Il n’y a pas de jeu sur l’esclavage par exemple, ni sur les nègres marrons, sur la colonisation. Autant de jeux particulièrement troublants sur lesquels jouer. La plupart des jeux on un à priori moral sur ces questions, mais je crois que la meilleure manière d’explorer ces univers est justement d’enlever l’aspect moral de l’affaire. En cela, le jeu comme Train est aussi un piège parce que le jeu est un processus qui cherche à amener le joueur vers une forme de condamnation morale. Je trouve en général les jeux moralisants particulièrement ennuyants, je pense que je ne suis pas le seul. La réalité est déjà bien suffisante comme cela.

C’est ce genre d’histoire qu’il faut que j’explore dans les semaines prochaines., peut-être qu’il faut que je reprenne plutôt l’idée du jeu sur la révolution française que de continuer le mécanisme sur le jeu des villages perchés. Il faudrait surtout passer à l’acte de créer de toute pièce le jeu pour voir comment ça tourne. Il faut que je passe à l’aspect mécanique de tout cela.

2 – Aller plus loin

Je me sens largement insatisfait des jeux qui sont créés aujourd’hui. J’ai souvent joué à des jeux ayant suffisamment d’ampleur pour être tout à fait passionnant à explorer. Pourtant, des continents entiers me semblent ignorés parce qu’on prend encore trop souvent le jeu comme un simple divertissement.

Des jeux comme Passage ou Train se rapprochent de ce que je peux avoir en tête parce qu’ils provoquent potentiellement une émotion forte et puissante. La plupart des jeux ne cherchent pas à émouvoir parce qu’ils cherchent souvent un public voir un consommateur. Emouvoir, c’est prendre le risque de déstabiliser. Il suffit de voir comment il est risqué de faire rire par exemple en ce moment. Ce désir que je ressens est clairement lié à un moment particulier du développement des jeux (notamment vidéos).

Le deuxième point qui me semble important, c’est l’aspect très moral des jeux. Comme le rire est, en suivant Bergson, un rappel vis à vis d’une norme sociale, le jeu est de même nature. Parce qu’il transmet un message, il est aisé de penser qu’on peut utiliser cette voie à des visées de propagande. Et ça a très largement été le cas. Mais de mon point de vue, je pense que le jeu, par l’espace protégé qu’il crée permet de mobiliser des humains autour d’un monde interdit, hors morale. Des jeux comme Junta ou Res Publica permettent de s’en rendre compte. On peut manipuler et assassiner dans ces jeux. Je pense que le jeu est puissant dans le sens qu’il peut nous permettre d’explorer des espaces normalement inaccessibles sans en subir les conséquences morales.